En voyant des jeunes se battre dans un parc de Saint-Laurent, le travailleur de rue Nicolas Lachance-Barbeau a eu l’idée d’utiliser les arts martiaux comme stratégie pour intervenir auprès des jeunes.
C’est de là qu’est née Horizon Tatamis, une entreprise d’économie sociale unique en son genre. « J’ai vu des jeunes qui faisaient ce qu’on appelle des ‘deux minutes’. Ils se mettent en cercle et ils se battent pendant deux minutes. Les voisins appelaient tout le temps la police, parce que les jeunes étaient dans le parc en train de se tirailler. Je me disais : quelle occasion d’intervention! C’est comme ça que ça a commencé. »
Aujourd’hui, Horizon Tatamis accompagne les jeunes de 12 à 25 ans à risque de vivre des problèmes psychosociaux (notamment en lien avec la santé mentale, les gangs de rue ou la délinquance) à travers les arts martiaux et les sports de combat.
Nicolas est lui-même un passionné des arts martiaux – un parcours qui a été structurant pour lui sur le plan personnel, au point qu’il en a fait le sujet de sa thèse. « On ne parle toujours que de soi… », glisse-t-il avec humour.
Faire de l’argent pour aider les gens
Ce qui rend Horizon Tatamis particulièrement original, c’est son modèle d’économie sociale : « On a les deux chapeaux : celui d’organisme communautaire, et celui d’entreprise d’économie sociale. »
Car c’est grâce aux revenus générés par une école d’arts martiaux ouverte à la population générale que l’organisme peut payer son loyer, ses installations, et maintenir des locaux de qualité professionnelle.
Cette école n’est pas juste un à-côté : elle est essentielle. Sans la participation du grand public aux cours, les interventions sociales ne pourraient tout simplement pas avoir lieu.
Horizon Tatamis est aussi soutenu par l’arrondissement de Saint-Laurent, le ministère de la Sécurité publique et d’autres partenaires.
Pour les jeunes en intervention, tout est gratuit : ils ont accès à un minimum de trois cours par semaine, encadrés par des coachs et des intervenant·es. L’organisme intervient également dans plusieurs écoles, des maisons de jeunes et d’autres organismes.
Plus qu’un simple loisir
Attention à ne pas confondre loisir et intervention , prévient Nicolas.
« Souvent, les gens ont l’impression que par la pratique même des arts martiaux, les jeunes vont développer une sorte de discipline, par transcendance… On se dit : ah oui, c’est bon pour canaliser! » Sauf que l’apprentissage qui est porté uniquement sur le geste technique ne garantit pas le développement de valeurs prosociales. « On le voit souvent, avec des athlètes qui ont des comportements problématiques à l’extérieur du terrain sportif, que la pratique du sport en soit n’est pas nécessairement gage de comportements prosociaux. » C’est ce qu’on en fait qui compte.
Chez Horizon Tatamis, chaque séance est accompagnée d’un atelier de discussion, dont le sujet est initié soit par les intervenant·es, soit par les jeunes eux-mêmes. Les participant·es remplissent aussi une feuille d’objectifs personnels et sportifs, avec des suivis réguliers.
« Le rôle de l’intervenant, c’est de faire le lien entre le dojo et la vie quotidienne. »
À titre d’exemple frappant, il cite le consentement. « Qu’est-ce qui différencie un combat dans le dojo d’une bagarre de rue? » Le cadre. Les règles. Le droit de se retirer à tout moment… Des notions qu’on peut ensuite transposer dans les relations sociales, amoureuses, à l’école, au travail.
Le dojo comme miroir
Au-delà de l’intérêt personnel, pourquoi choisir les arts martiaux pour aider les jeunes?
« On pourrait faire de l’intervention avec n’importe quel sport ou discipline artistique », reconnait Nicolas. Mais les arts martiaux sont un espace rare pour observer nos réactions fondamentales à la violence : fuite, évitement, agressivité, maîtrise de soi. Et à partir de là, on travaille.
Ce contexte se prête bien au développement de la persévérance, de la communication, du respect et de l’affirmation de ses limites. On y construit des relations de confiance, parce que les techniques sont dangereuses et qu’on a besoin de l’autre pour progresser en toute sécurité.
Autrement dit, chez Horizon Tatamis, on n’enseigne pas juste à donner des coups. On enseigne à choisir quand ne pas en donner et à nommer ce qui ne va pas. À canaliser, à réfléchir, à avancer.
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